La Facilité pour la reprise et la résilience et les gouvernements infranationaux
Dans les années à venir, le changement climatique et la transition numérique feront toujours partie intégrante des plans et des politiques de financement de l'Union européenne. Les gouvernements infranationaux jouent un rôle essentiel dans ces deux domaines ciblés par le redressement après la crise. Ils gèrent des services publics qui sont essentiels à l'atténuation du changement climatique, à la résilience sociale et à la cohésion territoriale. En tant que gouvernements locaux et régionaux disposant de pouvoirs réglementaires dans ces domaines, ils peuvent également contribuer à une croissance durable.
La Facilité pour la reprise et la résilience (FRR) est un mécanisme de financement majeur de l'Union européenne qui fournit des fonds à ses États membres pour qu’ils atteignent leurs objectifs dans ces domaines. Ce chapitre comprend une analyse rapide des plans nationaux pour la reprise et la résilience et des subventions accordées par le biais de la FRR du point de vue des gouvernements infranationaux. Étant donné que les plans pour la reprise et la résilience soumis à la Commission européenne sont le produit de programmes nationaux, la répartition locale et régionale de ces investissements n'est pas présentée de manière très détaillée.
Le chapitre suivant examine brièvement l'impact potentiel des réformes et des investissements des plans nationaux pour la reprise et la résilience sur les collectivités locales et régionales. Cette étude s'appuie sur les informations publiques (plutôt limitées) disponibles . Elle a été rédigée au début de la première année des programmes de financement de la FRR, alors que de nombreux projets et programmes de subvention nationaux étaient encore en cours d'élaboration. Étant donné le manque de données financières spécifiques, l'accent sera principalement mis sur les connexions indirectes entre les priorités de dépenses à l'échelle nationale et les fonctions des gouvernements infranationaux. Ces approximations montrent comment les gouvernements infranationaux peuvent bénéficier des fonds de la FRR. Le CCRE prévoit également d'utiliser ces informations comme base de référence pour les futures évaluations de la FRR et comme outil pour soutenir ses associations membres dans leurs activités de suivi local et régional.
Objectifs et gestion de la FRR
La Facilité pour la reprise et la résilience a été élaborée au cours d'une période sans précédent. Ce mécanisme de financement majeur de l'Union européenne a été lancé au cours de la première année du cadre financier pluriannuel pour 2021-2027. Ce financement supplémentaire opportun dans le cadre du plan de relance Next Generation EU instrument sera principalement utilisé pour le développement régional, la cohésion, la reprise et la résilience au cours de la deuxième année de la pandémie. Les objectifs des investissements financés par ces programmes sont définis en partie par le European Green Deal. Avec l'introduction d'un encadrement temporaire pour les aides d'État et l'adaptation des procédures du Semestre européen à la FRR, les pays bénéficiaires des subventions et des prêts de la FRR peuvent disposer d'une plus grande flexibilité en matière de dépenses.
Le budget total de la Facilité pour la reprise et la résilience est de 672,5 milliards d'euros, disponibles sous forme de dons (312,5 milliards d'euros) ou de prêts (360 milliards d'euros) pour la période 2021-2026. Le volet « dons » de la FRR est réparti entre les pays membres de l'UE sur la base de critères objectifs, tenant compte de la taille de la population, du développement économique (inverse du PIB par habitant, évolution du PIB) et du taux de chômage.
Au 1er mars 2022, 22 plans nationaux pour la reprise et la résilience (PRR) ont été finalisés et approuvés (les pays restants sont la Bulgarie, la Hongrie, les Pays-Bas, la Pologne et la Suède). Le montant total alloué dans le cadre des plans nationaux approuvés prévoit 291 milliards d'euros de subventions et 154 milliards d'euros de prêts. Des paiements de préfinancement pour 13 % du montant alloué ont déjà été initiés la première année mais n'ont pas encore été versés en totalité. La gestion effective de la FRR est régie par des accords opérationnels signés avec les États membres. En mars 2022, huit pays avaient franchi cette étape avec succès.
Subventions FRR et décentralisation
Selon les critères d'attribution de la FRR, la subvention par habitant est plus élevée dans les nouveaux pays membres de l'UE les moins développés économiquement (Figure 26) L'Italie et l'Espagne constituent les seules exceptions parmi les États développés, mais ces deux pays peuvent également être considérés comme des grands pays du Sud durement touchés par la crise et présentant d'énormes différences régionales internes. Cependant, à part ces deux pays, tous les autres grands bénéficiaires sont plus petits et moins décentralisés, avec des dépenses plus faibles au niveau du gouvernement local. En fait, les subventions de la FRR par habitant pour ces pays, qui comprennent la Grèce, le Portugal, la Roumanie, la Croatie et Chypre, sont nettement plus élevées que les dépenses de leurs administrations locales par habitant sur une année.
Figure 26 Dépenses infranationales et subventions de la FRR par habitant
Piliers de la FRR
Les six priorités de la FRR représentent des domaines critiques pour la sortie de crise, mais elles ont également été conçues pour fonctionner en tandem avec les réponses au changement climatique, tout en renforçant les bases de l'UE pour le développement économique futur par la numérisation, la croissance durable et une résilience accrue. Les « piliers » de la FRR qui en résultent sont les suivants : transition verte ; transformation numérique ; croissance intelligente, durable et inclusive ; cohésion sociale et territoriale ; santé et résilience économique, sociale et institutionnelle ; politiques pour la prochaine génération. Tous les plans nationaux pour la reprise et la résilience sont tenus d'allouer un minimum de 37 % des fonds de leur FRR à la transition verte (changement climatique) et 20 % à la transition numérique. Les gouvernements locaux peuvent bénéficier de ces subventions si leurs fonctions et compétences sont en accord avec les piliers de la FRR.
Étant donné qu'une action de réforme ou un investissement peut bénéficier à plusieurs programmes, les orientations de la FRR fixent des règles spécifiques en matière de suivi climatique et de marquage numérique. Par ex., la « rénovation de l'efficacité énergétique du parc de logements existants » se voit attribuer un coefficient de 40 % pour le soutien au changement climatique, tandis qu'une intervention relative aux « systèmes énergétiques intelligents » est comptabilisée à 40 % pour la transition numérique. Ces règles de la FRR sur les ratios de planification se compliquent lorsqu'une action agit en faveur de plus d'un pilier ciblé. Par ex., on peut dire que la modernisation des transports publics soutient à la fois la transition verte et la cohésion territoriale. Cela explique pourquoi certains examens indépendants du système de classification des subventions et des prêts de la FRR ont eu recours à une combinaison de piliers (classant également certaines actions comme « non catégorisées », voir l'ensemble de données Bruegel).Ce problème de catégorisation a été abordé ici en utilisant les données disponibles sur les subventions de la FRR par pilier, en les ventilant par affectation/cible de dépenses et en les présentant comme « primaires » ou « secondaires » à des fins d'analyse (voir Figure 27).
La moyenne des données de 22 pays montre que, en tant qu'allocation « primaire », les dépenses liées à la transition écologique représentent la part la plus importante des subventions de la FRR (42 %), la transformation numérique représentant le poste suivant (25 %). Pour ces deux postes, les limites minimales d'allocation requises de 37 % et 20 %, respectivement, ont été atteintes et dépassées. Sur le tiers restant du financement de la FRR, les subventions pour la croissance économique constituent la part la plus importante (11 %), et le reste du soutien est réparti de manière assez égale (6 %-8 %) entre les trois derniers piliers de la FRR. Toutefois, les subventions restantes sont principalement destinées à soutenir la cohésion sociale et territoriale (38 %) et la croissance économique (29 %) en tant qu'objectif « secondaire »,
Figure 27 Dépenses des subventions de la FRR par pilier (Primaire)
Figure 27 Dépenses des subventions de la FRR par pilier (Secondaire)
Moyennes non pondérées de 22 pays avec des plans nationaux approuvés
La Commission européenne a identifié sept « domaines phares » pour les réformes et les investissements. Ils représentent des priorités à prendre en considération à des fins de planification et sont tous liés à la transition verte et à la numérisation : Monter en puissance (technologies propres et renouvelables), Rénover (efficacité énergétique des bâtiments), Recharger et ravitailler (transport durable), Connecter (déploiement rapide de services à haut débit), Moderniser (numérisation de l'administration publique), Développer (capacités en matière de données en nuage et processeurs durables), Requalifier et améliorer les compétences (enseignement et formation en soutien de la transition écologique et numérique). Les plans nationaux pour la reprise et la résilience sont également guidés par ces domaines phares hautement prioritaires.
Deux séries d'orientations fournissant des instructions détaillées sur les principes de planification, le contenu et le format des plans pour la reprise et la résilience des États membres ont également été publiées Des exemples spécifiques sont inclus pour aider les gouvernements à rédiger leurs plans FRR et à développer les programmes nationaux.
Piliers de la FRR d'une grande importance locale
Le premier pilier de la FRR, relatif à la transition verte, représente la part la plus importante des dépenses nationales prévues pour la reprise et la résilience. Pour les 22 pays dont les plans ont été approuvés, il représente plus de 30 % des dépenses liées à la FRR (Figure 28). ). La part des dépenses liées à la transition verte est plus élevée dans les pays les plus décentralisés, à l'exception de quelques petits pays, comme le Luxembourg ou Malte.
Les quatre pays dotés de structures régionales fortes (Autriche, Belgique, Allemagne, Espagne) ont tous affecté plus de 40 % du budget de leur FRR à des interventions et des domaines politiques liés au climat. Parmi les pays moins décentralisés, le Portugal, la Grèce et Chypre ont alloué moins de fonds au pilier de la transition verte (alors que ce pilier est hautement prioritaire en Irlande). Les données nationales agrégées sur ce premier pilier indiquent une tendance claire, à savoir que les pays les plus décentralisés ont l'intention de dépenser davantage pour les investissements et les réformes liés à la transition verte.
Figure 28 Part des dépenses de la transition verte et décentralisation
Outre les piliers fondamentaux de grande portée - la transition verte et la transformation numérique , trois autres piliers sont particulièrement importants pour les gouvernements infranationaux et représentent des priorités de premier ordre: (i) la cohésion sociale et territoriale, avec son accent sur la réduction des inégalités ; (ii) la résilience, qui couvre les programmes de soins de santé gérés localement ; et (iii) le pilier de la prochaine génération, en raison des nombreuses interventions en matière d'éducation qui auront généralement lieu au niveau infranational. Les pays de la Figure 29 ont été classés en fonction de la part des fonds consacrés à la cohésion sociale et territoriale dans le total des contributions.
Figure 29 Part des subventions de la FRR par pays et décentralisation (piliers primaires sélectionnés)
Les pays dont la part des fonds de cohésion est supérieure à la moyenne sont assez hétérogènes : ils comprennent des pays de taille moyenne (Portugal, République tchèque, Irlande), deux pays dotés de structures fédérales (Belgique, Espagne), ainsi que l'Italie, qui présente d'énormes différences régionales.
Les pays les moins décentralisés envisagent de dépenser davantage pour les programmes relevant du pilier « résilience », où les dépenses de soins de santé et d'administration publique ont été budgétisées. La Slovaquie et l'Estonie sont les pays qui dépensent le plus dans ce groupe, même si les dépenses de santé sont relativement faibles dans ces deux pays (3 % et 15 %).
Dans le cadre du pilier « nouvelle génération », l'éducation constitue le poste de dépenses le plus important. Les subventions de la FRR peuvent contribuer à soutenir les gouvernements locaux dans des pays tels que la République tchèque et la Lituanie, où l'éducation représente près d'un tiers des dépenses locales, ou la France, où l'éducation publique est une fonction partagée (15 % des dépenses locales). Dans les pays où l'éducation n'est pas un mandat local (Chypre, Malte), ce sont les gouvernements nationaux qui bénéficieront de ce pilier et du soutien de la FRR.
Si l'on considère les piliers qui représentent des priorités secondaires secondaires (en termes d'allocation de subventions mais aussi d'impact sur les gouvernements infranationaux), la cohésion sociale et territoriale a reçu la plus grande part de subventions; ; le lien avec l'étendue de la décentralisation ne semble être qu'aléatoire (Figure 30). En outre, l'impact potentiel des subventions de la FRR sur les gouvernements infranationaux ne peut être déterminé par l'allocation globale des subventions par pilier.
Figure 30 Part des subventions de la FRR par pays et décentralisation (pilier secondaire sélectionné)
Domaines d'action privilégiés par priorité de pilier
Comme nous l’avons mentionné précédemment, quatre piliers de la FRR sont particulièrement importants pour les collectivités locales et régionales, notamment en raison de leur haut niveau de compétences et de leurs responsabilités en matière de prestation de services dans les domaines de la transition verte, de la santé et de la résilience, de la prochaine génération, et du fait qu'elles sont affectées par les programmes de cohésion sociale et territoriale. L'importance de ces piliers sélectionnés sera évaluée du point de vue des AIN en examinant la composition des subventions de la FRR par domaine politique.
Transition verte
Dans le cadre du premier pilier de la FRR, la mobilité durable est le domaine d'action privilégié, avec 32 % des dépenses « vertes » prévues (Figure 31). Les interventions comprennent des investissements coûteux pour les réseaux ferroviaires et des programmes de transports publics écologiques d'importance locale.
L'efficacité énergétique est également une priorité importante, représentant 29 % des dépenses totales prévues pour la transition verte. Ces subventions doivent être utilisées pour des investissements à portée locale, tels que l'amélioration de l'efficacité énergétique des bâtiments résidentiels, la rénovation des bâtiments publics, la gestion de la pauvreté énergétique, etc.
Les fonctions typiques des collectivités locales, , telles que la gestion des déchets solides à l'aide de solutions d'économie circulaire (par ex., le tri des déchets, le traitement des biodéchets), les services d'eau durables et d'autres programmes de prévention de la pollution environnementale, ne représentent que 2 à 4 % des dépenses totales du premier pilier.
Figure 31 Dépenses en faveur de la transition verte par domaine politique
L'Espagne fournit un bon exemple de programme national complet, l'Agenda urbain espagnol, qui cible divers éléments alignés sur la transition verte (voir Encadré 21).
Encadré 21 - Espagne : Mise en œuvre de l'Agenda urbain espagnol - plan de réhabilitation et de régénération
Ce volet du plan national espagnol FRR implique l'entrée en vigueur de l'Agenda urbain espagnol, une stratégie de rénovation à long terme pour la réhabilitation énergétique du secteur du bâtiment. Il sera mis en œuvre par le biais de diverses actions législatives touchant au logement, au droit de la propriété et à la création de guichets uniques de rénovation. Les objectifs d'investissement prévus comprennent un grand nombre de rénovations de logements résidentiels, la réduction de la consommation d'énergie primaire non renouvelable, la construction de logements sociaux économes en énergie, les rénovations dans les petites municipalités (moins de 5 000 habitants), les projets d'énergie propre rénovant les bâtiments publics en partie dans les petites municipalités.
Source: Annexe à la proposition de décision d'exécution du Conseil relative à l'approbation de l'évaluation du plan pour la reprise et la résilience pour l'Espagne {SWD(2021) 147 final}.
Cohésion sociale et territoriale
Les infrastructures et services territoriaux sont les domaines politiques prédominants des dépenses du pilier de la cohésion sociale et territoriale (66 % du total) (Figure 32). Cette catégorie englobe différentes activités sous le contrôle des collectivités locales, allant des services publics aux services administratifs. Le tiers restant des dépenses relatives à la cohésion est réparti entre divers services, dont beaucoup sont également importants au niveau infranational : formation professionnelle (8 %), logement social et services sociaux (7 % chacun), développement rural (6 %) et emploi (3 %).
Figure 32 Pilier de la cohésion sociale et territoriale : dépenses par domaine politique
Les domaines politiques typiquement liés aux collectivités territoriales dans le cadre de ce pilier sont les infrastructures territoriales et le développement rural. Leurs parts de subvention dans le cadre de la FRR vont de 15 % (Luxembourg) à 86 % (Roumanie) dans le cas des infrastructures et services territoriaux. Le développement rural a représenté la part la plus élevée au Danemark (58 %). La Roumanie a développé une composante spécifique à la FRR, intitulée « Fonds local », qui cible divers aspects du développement des infrastructures locales (Encadré 22).
Encadré 22 - Roumanie : Volet 10 - Fonds local
Un élément clé des réformes et des investissements est la mobilité urbaine durable. Cet objectif peut être atteint grâce à des stratégies et des orientations en matière de planification de la mobilité urbaine, à des modifications des règlements de zonage visant à limiter l'utilisation des voitures et à l'application de normes de service pour les transports publics. Les investissements de soutien comprennent des systèmes de surveillance de la qualité de l'air urbain, des flottes de transport zéro-émission et des systèmes de transport intelligents pour les unités territoriales administratives.
Source: ANNEXE à la Proposition de décision d'exécution du Conseil relative à l'approbation de l'évaluation du plan pour la reprise et la résilience pour la Roumanie {SWD(2021) 276 final}
Si l'on considère ensemble les dépenses consacrées aux infrastructures territoriales et au développement rural, ces domaines d'action sont les plus répandus dans les quatre pays dotés de structures fédérales (Autriche, Belgique, Allemagne et Espagne). Divers projets ont été prévus, tels que l'extension de la couverture à large bande en Autriche dans le cadre de la politique de développement rural. Dans les pays moins décentralisés − où les dépenses des administrations infranationales sont inférieures au seuil de 20 % des dépenses des administrations publiques − les dépenses relatives aux infrastructures territoriales et au développement rural ont été élevées à Malte, en Slovaquie, à Chypre, en Grèce et en Irlande. Dans ces pays, le financement de la FRR profitera vraisemblablement davantage aux programmes des gouvernements nationaux.
Figure 33 Infrastructures territoriales, développement rural et décentralisation
En Lettonie, les subventions de la FRR financeront sa réforme administrative territoriale, qui a été lancée en 2021 (Encadré 23).
Encadré 23 - Lettonie : Réduire les inégalités par une réforme de l’administration territoriale
Dans le cadre des réformes de l’administration territoriale, une nouvelle loi sur les municipalités introduisant des fonctions supplémentaires et une meilleure gouvernance devrait entrer en vigueur d'ici la fin de 2023. Dans ce nouveau cadre institutionnel, les investissements prévus serviront à améliorer le réseau de routes régionales et locales et à renforcer les capacités opérationnelles des municipalités. Des programmes seront lancés en vue de créer des parcs industriels dans les régions, de fournir des logements abordables, de promouvoir une éducation de haute qualité en investissant dans l'enseignement secondaire général et les infrastructures locales connexes, d'acheter des véhicules de transport public zéro-émission au niveau local et de soutenir l'accès aux services publics et à l'emploi pour les personnes handicapées.
Source: ANNEXE à la Proposition de décision d'exécution du Conseil relative à l'approbation de l'évaluation du plan pour la reprise et la résilience pour la Lettonie {SWD(2021) 162 final}
Une enquête menée auprès d'associations de collectivités locales dans 19 pays indique que les collectivités locales et régionales ne sont pas satisfaites des plans nationaux de cohésion territoriale (Tableau 8). Une majorité écrasante des personnes interrogées a déclaré que les plans nationaux pour la reprise et la résilience ne contribuent pas du tout, ou seulement de manière limitée, au renforcement de la cohésion territoriale. Il est également frappant de constater qu'un cinquième des associations ne connaissaient pas, ou n'avaient pas d'opinion sur, cet aspect territorial essentiel de la reprise.
Tableau 8 PRR sur la cohésion territoriale | |
Le plan contribue efficacement à renforcer la cohésion territoriale | |
Dans une large mesure | 8,3% |
Dans une certaine mesure | 54,2% |
Pas du tout | 16,7% |
Ne sait pas/ Sans opinion | 20,8% |
Total | 100,0% |
Santé et résilience
Les services de soins de santé (48 %) et une administration publique efficace (30 %) représentent les principaux domaines de dépenses du pilier concernant la santé et la résilience économique, sociale et institutionnelle (Figure 34). Les onze autres domaines politiques ne représentent que 22 % des dépenses de ce pilier. Les domaines politiques visés sont assez larges et vont de la préparation aux crises et de la capacité de réaction aux crises aux réformes du secteur financier et à la prévention de la fraude.
Figure 34 Pilier « santé et résilience » : dépenses par domaine politique
Les subventions de la FRR pour les soins de santé, qui représentent près de la moitié des dépenses de ce pilier, constituent une part importante, avec des implications locales significatives dans les pays où il s'agit d'une fonction des gouvernements locaux (par ex., l'Estonie, la Lettonie, la Finlande, la Roumanie). Dans d'autres pays, en revanche, même si les gouvernements locaux ont le même type de fonctions étendues en matière de santé au niveau infranational, l'impact des subventions de la FRR se fera davantage sentir au niveau des collectivités locales intermédiaires (Italie, Danemark, Autriche).
L'Autriche a développé divers programmes visant à renforcer la résilience infranationale (régionale et municipale) (Encadré 24).
Encadré 24 - Autriche : Interventions visant à accroître la résilience des gouvernements infranationaux
Plusieurs réformes et investissements spécifiques ont été proposés dans le cadre du plan national pour la reprise et la résilience de l'Autriche, qui impliqueront les administrations régionales (Länder) et municipales. Les réformes portent sur un large éventail de questions, notamment : l'élaboration d'une feuille de route pour la stratégie autrichienne de protection des sols, qui fixe un objectif spécifique de réduction de l'utilisation des sols, l'amélioration de l'offre de soins de longue durée et l'élaboration d'un cadre fiscal fondé sur des objectifs à tous les niveaux de gouvernement, conformément à la loi sur les relations fiscales intergouvernementales (« réforme fiscale éco-sociale »). Parmi les exemples d'investissements, citons les projets de rénovation thermique, les raccordements au chauffage urbain à haut rendement, les projets de recyclage des friches industrielles pour des centres-villes respectueux du climat et les projets pilotes de soins infirmiers communautaires.
Source: ANNEXE à la Décision d'exécution du Conseil relative à l'approbation de l'évaluation du plan pour la reprise et la résilience pour l'Autriche, 2021/0162 (NLE)
Politiques pour la prochaine génération
Les trois niveaux d'enseignement (74 % du total des subventions), l'éducation et l'accueil de la petite enfance (14 %) et l'emploi des jeunes (12 %) constituent la majorité des subventions du pilier de la prochaine génération, ce qui garantit son importance locale. Parmi les pays dont l'enseignement public est décentralisé, à savoir la Lituanie, la République tchèque, la Croatie (voir Encadré 25), la Slovénie et la France, ces deux derniers bénéficieront le plus des subventions de la prochaine génération (Figure 35). Les pays dont le ratio des subventions du pilier de la prochaine génération est faible, mais dont la part du budget local de l'éducation est élevée sont la Slovaquie, l'Estonie, la Lettonie, la Finlande et deux des pays fédéraux (Autriche, Allemagne). Étant donné que les subventions de la prochaine génération dans ces pays viseront principalement le niveau d'enseignement tertiaire (supérieur), leurs collectivités locales bénéficieront moins de ces subventions de la FRR.
Figure 35 Rapport entre les subventions de la prochaine génération et la part des dépenses d'éducation dans les budgets locaux
Encadré 25 - Croatie : Réforme du système éducatif
Les réformes prévues d'importance locale visent le modèle de financement de l'Éducation et de la Garde des jeunes enfants (Early Childhood Education and Care - ECEC), l'introduction de l'enseignement à temps plein et une évaluation des besoins en matière d'enseignement secondaire. Les investissements serviront à augmenter le nombre de places dans les services d'accueil de la petite enfance, le nombre d'écoles primaires à un seul poste et la fréquentation des écoles secondaires générales.
Source: ANNEXE à la Proposition de décision d'exécution du Conseil relative à l'approbation de l'évaluation du plan pour la reprise et la résilience pour la Croatie {SWD(2021) 197 final}
Subventions par domaine thématique
Les subventions de la FRR déjà allouées comprennent un total de 26,7 milliards d'euros pour les énergies propres et 41,8 milliards d'euros pour l'administration publique numériqueDe nombreux programmes d'énergie propre visent la décarbonisation des systèmes énergétiques, compte tenu du fait que la consommation d'énergie produit 75 % des émissions de gaz à effet de serre. L'utilisation d'énergies renouvelables, combinée à des sources alternatives (par ex., l'hydrogène), aura un impact sur de nombreux services fournis par les administrations locales, notamment les transports, le chauffage et les bâtiments. Les dépenses de la FRR se concentreront également sur le développement des réseaux d'infrastructures et le soutien aux réformes dans ce domaine.
Les programmes d'administration publique numérique couvrent tous les aspects de la gouvernance en ligne (soins de santé, justice) et, dans une perspective climatique, la numérisation des systèmes de transport et d'énergie. Les réformes dans ces domaines visent à intégrer les plateformes de services, la gestion des données, l'analyse et la prise de décision. Les investissements visent les technologies qui soutiennent ces programmes.
Aucun schéma spécifique n'a été détecté concernant la relation entre la décentralisation et les dépenses de la FRR en matière d'énergie propre (Figure 36). La Grèce, l'Italie, Chypre et la Croatie sont les pays qui dépensent le plus (par habitant) pour l'énergie propre, mais le rôle joué par les collectivités locales dans le secteur public de ces pays varie fortement, ce qui influence la distribution et l'importance des subventions. On peut supposer que les collectivités locales bénéficieront davantage des programmes d'énergie propre dans les pays les plus décentralisés comme l'Italie, la Croatie, la Lituanie et l'Espagne. Cependant, dans d'autres pays décentralisés (Allemagne, France et Autriche), où les dépenses pour les programmes d'énergie propre sont relativement faibles, les échelons supérieurs du gouvernement sont susceptibles d'être les principaux bénéficiaires des subventions de la FRR.
Figure 36 Énergie propre, services publics numériques et décentralisation
Les plans nationaux du point de vue des GLR
La planification active des programmes de la Facilité pour la reprise et la résilience au niveau national a un impact significatif sur les services et les finances aux niveaux local et municipal. L'inclusion des collectivités locales et régionales durant cette phase de développement est donc vitale. Deux organisations européennes, le Comité des régions (CdR) et le CCRE, ont donc mené une enquête auprès des gouvernements infranationaux sur leur implication et leur évaluation des plans nationaux >approuvés . Les réponses de 19 pays de l'UE (25 associations de collectivités locales et/ou régionales) ont mis en évidence la nécessité de consulter davantage les collectivités locales, bien que les pratiques des gouvernements nationaux diffèrent largement sur le continent.
Une majorité écrasante a déclaré que les plans nationaux de la FRR répondent efficacement aux principaux défis auxquels sont confrontées les collectivités locales et régionales « dans une mesure limitée » (75 % des répondants). Seuls 8 % des répondants estiment que leurs objectifs ont été intégrés dans les plans de réforme et d'investissement (Tableau 9).
Tableau 9 Adéquation du PRR | |
TLe plan répond efficacement aux principaux défis auxquels sont confrontées les collectivités locales et régionales | |
Dans une large mesure | 8,3% |
Dans une certaine mesure | 75,0% |
Pas du tout | 4,2% |
Ne sait pas/ Sans opinion | 12,5% |
Total | 100,0% |
Selon les collectivités locales interrogées, les principaux objectifs de la Facilité pour la reprise et la résilience ont été pris en compte dans les plans nationaux (Tableau 10). Conformément aux priorités de dépenses, la transition numérique et la transition verte/durable ont reçu le plus de soutien. Les collectivités locales pourraient tirer un grand profit de programmes réussis dans ces domaines. Toutefois, la dimension de cohésion territoriale de la FRR, importante au niveau local, a été évaluée comme étant la moins efficace.
Tableau 10 Évaluation des Plans pour la reprise et la résilience | |
Le plan effectivement... | Score moyen |
... soutient la transition numérique | 2,29 |
... soutient la transition vers une économie verte/la durabilité | 2,27 |
... répond aux principaux défis auxquels sont confrontées les collectivités locales et régionales | 2,05 |
... coordonne le financement de la reprise avec d'autres sources de financement, notamment les fonds de l'UE | 2,00 |
... soutient les initiatives transfrontalières à valeur ajoutée européenne | 1,91 |
... contribue à renforcer la cohésion territoriale | 1,89 |
Question : Dans quelle mesure êtes-vous d'accord avec les déclarations [ci-dessus] concernant le plan national pour la reprise et la résilience de votre pays ? Dans une large mesure : 3 ; Dans une certaine mesure : 2 ; Pas du tout : 1 |
Évaluation et suivi
Au cours de la phase préparatoire, les plans nationaux pour la reprise et la résilience ont été évalués par la Commission selon des critères d'évaluation généraux. Les normes utilisées étaient celles fixées par le règlement de la FRR : pertinence (mesures complètes et équilibrées), efficacité (impact durable, suivi efficace), efficience (justification raisonnable du rapport coût-efficacité) et cohérence des actions. Une notation spécifique a été utilisée pour classer le degré d'alignement des plans nationaux sur ces critères (important (A), modéré (B), faible (C)).
Outre les critères d'évaluation généraux, le règlement FRR a également précisé d'autres éléments ajoutant de nouveaux aspects d'évaluation : l'impact durable des mesures, les jalons et les objectifs permettant de suivre les progrès, le respect du principe consistant à « ne pas causer de préjudice important. » Les plans nationaux doivent également prévoir des mécanismes de contrôle et d'audit adéquats.
L'avancement de la mise en œuvre des plans pour la reprise et la résilience est présenté dans un tableau de bord public de la FRR, qui fournit, non seulement des mises à jour concernant les contributions financières et les décaissements, mais indique également le degré de réalisation des réformes (jalons) ) et des investissements (objectifs). Un ensemble de 14 indicateurs communs est également mesuré. Les dépenses sociales sont également évaluées en étiquetant les dépenses selon neuf dimensions liées à de grandes catégories sociales en matière d'emploi, d'éducation, de soins de santé et de politiques sociales.
Le rôle des collectivités locales et régionales
Selon les orientations données aux États membres concernant les PRR nationaux, les autorités locales doivent être consultées et impliquées dans le processus de la FRR, pendant l'élaboration des plans et dans le suivi de sa mise en œuvre. Le règlement de la FRR appelle également à la coordination et à la complémentarité des programmes et des instruments entre les différents niveaux de gouvernement, en mettant l'accent sur les niveaux régionaux, le cas échéant. Par ailleurs, les gouvernements locaux sont rarement mentionnés dans le règlement ou les méthodes d'orientation de la FRR.
Les associations de GLR ont indiqué dans quelle mesure les collectivités locales ont été impliquées dans les différentes étapes de la planification et de la préparation du PRR national (Tableau 11). La majorité des personnes interrogées ont déclaré qu'elles avaient seulement été informées du processus global (40 %), tandis qu'environ un tiers ont été consultées (le plus souvent avec un impact limité sur le résultat). Elles ont été informées des priorités générales des plans nationaux (44 % des répondants) mais pas consultées sur les objectifs (ce qui n'est arrivé qu'à 16 %).
Des aspects spécifiques des programmes nationaux ont été développés sans la contribution des gouvernements locaux. Une majorité d'entre eux ont répondu qu'ils n'avaient pas du tout été impliqués (ou ne savaient pas/ne répondaient pas) dans l'identification des réformes (56 %) ou des investissements (52 %). Les éléments critiques du processus de planification, tels que la coordination, la validation et les délais, ont également été décidés sans les gouvernements locaux (56 %) ; ils ont seulement été informés des aspects de gouvernance (28 %).
Tableau 11 Participation des collectivités locales à la préparation des PRR nationaux | |||
Consultés | Informé seulement | Pas du tout, ne sait pas | |
3 | 2 | 1 | |
Processus global | 32,0% | 40,0% | 28,0% |
Définition des priorités et des objectifs globaux du PRR national | 16,0% | 44,0% | 40,0% |
Identification d'investissements spécifiques | 32,0% | 16,0% | 52,0% |
Identification de réformes spécifiques | 28,0% | 16,0% | 56,0% |
Gouvernance du processus | 16,0% | 28,0% | 56,0% |
Question : Dans quelle mesure avez-vous, ou vos membres, participé à la préparation du Plan national pour la reprise et la résilience (PRR national) de votre gouvernement national ? Consulté avec un impact sur le résultat, Consulté avec un impact nul/limité : 3 ; Informé seulement : 2 ; Pas du tout, Ne sait pas/Pas de réponse :1 |
L'avenir du suivi local
En tant qu'acteurs importants affectés par les réformes des plans nationaux et bénéficiant également des investissements financés par la FRR, les gouvernements locaux et régionaux devraient avoir leur mot à dire dans la mise en œuvre de la FRR. Selon l'enquête, les gouvernements locaux et leurs associations jouent un rôle plutôt limité dans la mise en œuvre de la FRR. Sur une échelle à trois points, ils ont été négligés lorsqu'il s'agissait de leur attribuer des rôles appropriés, d'être des partenaires à part entière du gouvernement national et de s'approprier pleinement les plans ou les projets au niveau local (score moyen : 1,50, voir Tableau 12).
Les résultats peuvent être considérés comme étant légèrement plus favorables pour ce qui est de l'utilisation des pouvoirs spécifiques des gouvernements locaux (1,65) et de l'exercice d'une influence locale sur toute modification potentielle des PRR (1,67). Le dialogue et l'échange d'informations avec le gouvernement national sur les mécanismes et procédures de mise en œuvre ont obtenu le score le plus élevé (1,82). Néanmoins, tous ces aspects de la mise en œuvre sont loin d'être l'idéal pour la participation des collectivités locales ; le niveau moyen d'implication est faible, n'atteignant même pas le niveau de « dans une certaine mesure » (le score médian).
Tableau 12 Mise en œuvre du Plan pour la reprise et la résilience | |
Vous/vos membres... | Score moyen |
... établissez des dialogues et recevez des informations opportunes et exhaustives du gouvernement national concernant les procédures et les mécanismes de mise en œuvre | 1,82 |
... avez la possibilité de suggérer des changements dans la mise en œuvre des plans afin de vous adapter aux changements imprévus | 1,67 |
... êtes suffisamment pris en compte dans la mise en œuvre du plan, sur la base de vos compétences/responsabilités spécifiques | 1,65 |
... vous êtes largement approprié le plan et les projets qu'il contient | 1,50 |
... êtes un partenaire à part entière du gouvernement national dans la phase de mise en œuvre | 1,50 |
... jouez un rôle approprié dans le suivi des résultats des réformes et des investissements et dans la réalisation des objectifs et des étapes du plan national | 1,50 |
Question : En ce qui concerne la phase de mise en œuvre, dans quelle mesure êtes-vous d'accord avec les affirmations suivantes ? Dans une large mesure : 3 ; Dans une certaine mesure : 2 ; Pas du tout : 1 |
La mise en œuvre des principes de planification et de suivi de la Commission européenne ne peut être correctement évaluée que par la collecte d'informations spécifiques à chaque pays et par des enquêtes complètes après deux à quatre ans. L'enquête conjointe du CCRE et du Comité des régions permet d'analyser la manière dont les différents plans nationaux de la FRR ont répondu aux principaux défis locaux, la mesure dans laquelle ils ont renforcé la cohésion territoriale, travaillé en coordination avec d'autres fonds européens et soutenu les priorités de la FRR du point de vue des GLR. Les domaines qui obtiennent des évaluations défavorables devraient faire l'objet d'évaluations et de modifications futures.
Tel que montré par l'analyse des subventions de la FRR ci-dessus, la dimension locale des plans pour la reprise et la résilience doit être évaluée principalement par les pays. Les domaines politiques ou les principaux piliers des plans nationaux doivent être alignés sur les fonctions des collectivités locales et régionales. Les GLR sont les mieux placés pour quantifier la pertinence locale des investissements et des réformes réalisés dans le cadre des différents piliers de la FRR.
Les données nationales sur la mise en œuvre de la FRR seront limitées, comme l'indique une enquête sur les PRR nationaux : « ...68 % des pays se sont engagés à publier de manière proactive des informations sur la mise en œuvre de la FRR [...], seuls deux pays (Chypre et Roumanie) ont effectivement mentionné la fourniture de données accessibles et ouvertes sur leurs dépenses [...] et seuls deux pays ont promis de publier des informations complètes sur les bénéficiaires finaux (Bulgarie, Roumanie”
Quoi qu'il en soit, toute évaluation exhaustive des six piliers s'avérera toujours compliquée, car les dépenses sont souvent destinées à des fins multiples. Horizontalement, les actions peuvent se chevaucher entre les piliers et/ou les domaines politiques.
À l'avenir, il sera possible de mesurer plus efficacement la mise en œuvre effective des plans pour la reprise et la résilience en utilisant les rapports de décaissement nationaux. . Les statistiques financières contenues dans ces rapports nationaux permettront de savoir si les objectifs de dépenses profitent principalement aux collectivités locales ou régionales et comment les objectifs initiaux ont été atteints. Pour compléter les évaluations de la FRR par des rapports exhaustifs incluant les dimensions locale et régionale, les données de base utilisées par la Commission, et pas seulement les ratios agrégés, devraient être rendues accessibles au public.