Affectation des recettes et fiscalité

Après l'analyse des dépenses budgétaires, ce chapitre se concentre sur les sources de financement des gouvernements infranationaux. Ce domaine clé des finances locales est déterminé par la composition des quatre types de recettes des collectivités locales : recettes propres, impôts et taxes partagés, transferts intergouvernementaux et prêts. En dehors de ces données financières, les rapports disponibles sur les pays étudiés ne fournissent que des informations incomplètes sur la forme réelle de la décentralisation fiscale, c'est-à-dire le degré d'autonomie et les méthodes de collecte des recettes.

Décentralisation des recettes et dépendance vis-à-vis des subventions

Les administrations infranationales contrôlent une part importante des impôts dans les pays les plus décentralisés et dans les pays fédéraux (Figure 13). Dans les pays scandinaves, ainsi qu'en Allemagne et en Espagne, où les états/régions ont des responsabilités étendues, les impôts infranationaux représentent plus de 25 % de l'ensemble des impôts publics perçus (les impôts locaux propres et partagés sont comptabilisés ensemble). À l'autre extrémité du spectre, on trouve les pays moins décentralisés ou ceux qui sont plus dépendants des transferts intergouvernementaux (partie gauche du graphique).

Figure 13 Décentralisation fiscale infranationale, 2010-2020
Impôts infranationaux en % des recettes fiscales totales

Les réponses aux défis fiscaux de la crise économique ont été différentes selon les pays du CCRE. Dans les pays où les recettes fiscales locales sont plus élevées, l'importance des impôts locaux a encore augmenté. Au sein de ce groupe − à l'exception d'Israël, de la Lettonie et de la Finlande − le ratio des impôts perçus localement était plus élevé en 2020 qu'il y a dix ans. Dans les pays les moins décentralisés, ceux dont la part des impôts locaux était plus faible étaient plus réticents à accroître les pouvoirs de collecte de recettes propres. Par conséquent, la baisse de la fiscalité locale se traduit par une nouvelle diminution des impôts locaux.

La fiscalité locale a fait l'objet de réformes diverses à différents stades de la reprise économique et de la gestion de la crise (voir les cas de l'Autriche et de la France dans l'Encadré 14).

Encadré 14 - Réformes de la fiscalité locale en Autriche et en France

En Autriche, trois grandes réformes fiscales visant à alléger la charge pesant sur les entreprises ou la population ont été introduites au cours de la dernière décennie. Elles ont réduit les recettes locales provenant des impôts partagés, bien que ce manque à gagner ait été partiellement compensé par des subventions de péréquation fiscale. La réforme fiscale éco-sociale couvrant la période 2020-2024 est particulièrement importante, car elle entraînera des pertes de recettes municipales de 2,1 milliards d'euros. Les recettes de la taxe sur le CO2 nouvellement introduite reviendront exclusivement au gouvernement fédéral. Aucune nouvelle taxe liée au climat n'a été introduite au niveau local.

En France un impôt local sur les entreprises (30 milliards d'euros) a été supprimé en 2010, car il était trop variable et pénalisait l'investissement et l'emploi. Il a été remplacé par :

- la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui a rapporté 19 milliards d'euros en 2020 et a été répartie entre les communes et les établissements de coopération intercommunale (26,5 %), les départements (23,5 %) et les régions (50 %) ;

- la cotisation foncière des entreprises (CFE) qui a rapporté 8 milliards d'euros en 2020 et a été collectée par les communes et les entités de coopération intercommunale (voir Encadré 4 plus haut).

Par ailleurs, les entreprises versent également la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), qui a rapporté 35 milliards d'euros de recettes locales en 2020, dont environ 33 % ont été payés par les entreprises et 66 % par les ménages.

En 2021, ces impôts sur la production (chiffre d'affaires, valeur ajoutée, foncier bâti) ont encore été réduits, afin de ne pas pénaliser la compétitivité des entreprises. Cela s'est fait en divisant par deux la CVAE pour toutes les entreprises par la suppression de la part des régions et en divisant par deux la valeur locative foncière des établissements industriels (pour la CFE et la TFPB).

Ces pertes de recettes fiscales locales ont été compensées par des transferts de l'État (3 milliards d'euros). Les régions ont bénéficié d'une nouvelle part de TVA (9 milliards d'euros). Les communes et les établissements de coopération intercommunale ont été compensés par des dotations de l'État, qui ont pris en compte l'assiette fiscale mais pas les taux perçus.

Pour plus d'informations, voir Le débat d'orientation budgétaire (D.O.B.) illustré - Janvier 2021 - La Banque Postale

Pour un groupe diversifié de pays, le ratio des transferts intergouvernementaux et des subventions dans les budgets infranationaux est élevé, représentant plus de 60 % des recettes budgétaires infranationales. La dépendance vis-à-vis des subventions, en tant qu'indicateur symétrique de l'autonomie des recettes locales, est généralement élevée dans les petits pays en transition, ainsi qu'aux Pays-Bas, en Autriche, au Royaume-Uni et en Italie (Figure 14). Cela indique que l'autonomie des recettes locales n'est pas seulement déterminée par le poids des transferts intergouvernementaux, mais que les méthodes d'allocation des subventions peuvent également s'avérer critiques. Inversement, dans les pays où les recettes partagées sont importantes, les gouvernements locaux reçoivent moins de financement par le biais de transferts intergouvernementaux. C'est le cas du groupe comprenant la Turquie, trois des pays des Balkans occidentaux et les pays scandinaves et fédéraux.

Figure 14 Dépendance à l'égard des subventions, 2020 et changements entre 2010 et 2020
Subventions en % du total des recettes infranationales

Au cours de la dernière décennie, le ratio de dépendance à l’égard des subventions a évolué pour les deux groupes de pays. Cependant, aucune tendance discernable n'a été identifiée dans les pays où la part des transferts du budget national est plus ou moins élevée. Les raisons de ces changements étaient différentes dans chaque pays ; les restrictions budgétaires globales (par ex., en Grèce), la centralisation radicale des fonctions locales (par ex., en Hongrie) ou les changements dans les politiques fiscales (par ex., en France) peuvent tous avoir contribué aux réductions des transferts intergouvernementaux.

Les programmes budgétaires nationaux visent souvent les investissements environnementaux locaux et l'amélioration de la gestion des services (Encadré 15). Ces programmes de transfert fiscal existent aussi bien dans les pays dont le ratio de dépendance aux subventions est plus élevé (par ex., l'Estonie, l'Autriche) que dans ceux dont les revenus partagés sont plus importants (par ex., la Turquie). Étant donné que l'impact environnemental des investissements subventionnés s'étend au-delà des limites de la municipalité bénéficiaire, ces programmes de subventions et de soutien nationaux ou souvent supranationaux (Union européenne) sont justifiés.

Encadré 15 - Programmes de soutien financier et subventions municipales

En Autriche, , le programme d'investissement municipal du gouvernement fédéral comporte un paquet d'investissement d'un milliard d'euros, couvrant principalement 2020/2021, et un deuxième paquet municipal de 1,5 milliard d'euros pour 2021. Il s'agit d'une subvention de contrepartie avec 50 % de financement fédéral et les 50 % restants couverts en partie par l'État (Land) ou les fonds de l'UE et en partie par les municipalités. Le montant du financement par commune est plafonné en fonction des conditions démographiques. Ce deuxième paquet municipal consiste en une aide supplémentaire de 500 millions d'euros pour 2021 (une augmentation de 400 millions d'euros des parts de recettes et 100 millions d'euros de fonds structurels) et un milliard d'euros d'avances sur les futures parts de recettes pour résoudre le problème urgent de la sécurisation des liquidités. Compte tenu de l'environnement économique favorable, les municipalités ne sont pas tenues de rembourser les avances. Il y a également l'extension de la péréquation financière, qui constitue une compensation partielle (310 millions d'euros) du manque à gagner pour les recettes locales résultant de la réforme fiscale éco-sociale.

Le Fonds pour les catastrophes du gouvernement fédéral autrichien a été créé en 1966 pour financer des mesures visant à prévenir les catastrophes futures et à réparer les dommages éventuels. La majorité (75 %) des ressources du Fonds pour les catastrophes (480 millions d'euros en 2019) a été utilisée pour des mesures préventives, principalement pour atténuer les dommages futurs causés par les inondations et les avalanches, par ex., la protection passive contre les inondations et les enquêtes sur la qualité de l'eau. Le reste des fonds a été consacré à la gestion des dommages et aux équipements de lutte contre les incendies.

Les subventions pour les mesures préventives (352 millions d’euros) ont été utilisées dans une large mesure par le gouvernement fédéral. En 2019, les municipalités ont reçu 20 millions d'euros pour la lutte contre les dommages et 43 millions d'euros pour l'équipement d'urgence des services d'incendie. En cas de dommages aux biens des provinces et des communes, le Fonds pour les catastrophes rembourse 50 % des pertes.

En Estonie, des programmes locaux d'efficacité énergétique subventionnés par le gouvernement central et visant à soutenir les investissements des collectivités locales en matière d'économie d'énergie dans les bâtiments publics sont en place depuis le milieu de la dernière décennie. Ils sont financés par les revenus de la vente de CO2. Ce soutien budgétaire permet de promouvoir la construction de bâtiments publics locaux à énergie quasi nulle (20 millions d'euros) et la conversion de bâtiments publics locaux existants (10 millions d'euros). Ces mesures d'économie d'énergie réduisent les coûts d'entretien des bâtiments publics. D'autres mesures locales de développement de l'efficacité énergétique de plus en plus courantes concernent la modernisation de l'éclairage public avec la technologie LED, l'utilisation accrue des nouvelles technologies de chauffage par la rénovation des chaufferies et des systèmes de chauffage et la transition des consommateurs vers les réseaux de chauffage locaux.

En Turquie le Projet national zéro déchet vise à gérer les déchets conformément aux principes du développement durable, en laissant une Turquie propre et un monde vivable aux générations futures. Le programme a été lancé en 2017 et est mis en œuvre par le ministère de l'Environnement, de l'Urbanisation et du Changement climatique et localisé par l'Union des municipalités de Turquie (UMT).

Les municipalités ont été encouragées à utiliser des modèles « zéro déchet » dans leurs bâtiments publics. L'UMT a fourni une assistance technique aux municipalités afin de les préparer à la certification de niveau supérieur. En outre, dans le cadre du Projet zéro déchet, le projet « Zero Waste Blue » a été lancé pour protéger les mers et les côtes de Turquie.

Avec le projet « zéro déchet » on espère atteindre un objectif de taux de récupération de 35 % (proportion de déchets recyclés à partir de tous les matériaux recyclables) dans 400 000 bâtiments avant la fin de 2023. Les économies potentielles ont été calculées à 17 milliards de TRY, avec des emplois directs pour 100 000 personnes et des économies annuelles de 20 milliards de TRY.

Le projet est basé sur le « Système zéro déchet », une feuille de route en sept étapes que doivent suivre les entreprises, institutions ou organisations participant au programme. Cette feuille de route a été élaborée par le ministère de l'Environnement, de l'Urbanisation et du Changement climatique. L'UMT a organisé des concours nationaux pour les municipalités, afin de promouvoir certains sujets, par ex., le concours de projets et d'idées « zéro déchet » organisé en 2020, qui a accordé des subventions de 500 000 TRY (31 000 EUR) à 20 municipalités.

En 2020, le Système de gestion zéro déchet a été mis en œuvre dans 76 000 bâtiments publics, avec un taux de récupération initial de 13 % qui n'a cessé d'augmenter pour atteindre finalement 19 %. Entre 2017 et 2020, le projet a permis d'économiser 397 millions de tonnes de matières premières, 315 millions de kilowattheures d'énergie, 345 millions de mètres cubes d'eau et 50 millions de barils de pétrole. Au cours de la même période, 17 millions de tonnes de déchets utilisables ont été collectées, 2 milliards de tonnes d'émissions de gaz à effet de serre ont été évitées et 209 millions d'arbres ont été sauvés par le projet.

Différences dans les politiques de recettes locales

Les systèmes fiscaux locaux des pays du CCRE sont principalement structurés autour de l'impôt sur le revenu (personnel, bénéfices) ou de l'impôt sur les terrains et les constructions (Figure 15). Selon les statistiques fiscales de l'OCDE, dans les 16 pays qui perçoivent des recettes provenant de l'impôt sur le revenu, cette source représente plus de la moitié de leurs recettes fiscales locales totales (partie gauche du graphique). Les impôts sur le revenu des personnes physiques peuvent être attribués au lieu d'origine, où ils ont été perçus, ou ils peuvent être réattribués à l'aide d'une formule. Le mécanisme de partage de l'impôt sur le revenu le plus progressif est la méthode de la surtaxe, selon laquelle les gouvernements infranationaux ont le pouvoir de fixer leurs propres taux (par ex., en Scandinavie, en Allemagne et en Croatie).

Figure 15 Systèmes d'imposition locale basés sur l'impôt sur le revenu et l'impôt foncier, 2020

L'autre groupe de pays (partie droite du graphique) s'appuie sur l'impôt foncier local. Il s'agit des pays les moins décentralisés et les plus petits. Cependant, la prépondérance de cet impôt sur les terrains et les bâtiments dans ces pays est due soit à la tradition, en tant que seule principale recette fiscale locale existante (par ex., le Royaume-Uni), soit à son introduction pendant la transition (Kosovo, Albanie, Lituanie, Estonie).

Changements dans la fiscalité locale

Les systèmes fiscaux locaux ont subi des réformes mineures au cours de la période post-crise (Figure 16). Deux tendances peuvent être identifiées dans les pays du CCRE. Premièrement, conformément aux objectifs de politique économique de l'époque, la charge fiscale locale pesant sur les entreprises et sur la production a été réduite. La composition des impôts locaux s'est déplacée vers l'impôt foncier dans ces pays. Un impôt sur les bâtiments et les terrains a un effet de distorsion moins direct sur les activités commerciales, tout en étant une source plus stable de recettes locales. Diverses formes de prélèvement d'impôts sur les gains en valeur des terrains sont également de plus en plus développées (voir Encadré 16).

Encadré 16 - Taxes d'aménagement en Autriche

La taxe d'aménagement est un paiement obligatoire et unique à la municipalité. La taxe devient exigible dès qu'une parcelle de terrain est désignée comme site de construction ou qu'un permis de construire est délivré. La taxe d'aménagement est généralement calculée en fonction de la superficie de la parcelle ou d'autres indicateurs (par ex., la classe de construction, la valeur imposable). Son montant varie selon l'état (Land). Son utilisation n'est pas affectée, mais elle finance, par ex., les routes, les trottoirs, l'éclairage public et les systèmes de drainage.

La deuxième tendance peut être observée à l'autre extrémité de ce graphique (Figure 16) avec les pays qui se sont légèrement éloignés de l'impôt foncier, expérimentant soit des impôts sur le revenu (revenus, bénéfices, gains en capital), soit des impôts sur les produits (ventes, accises, véhicules à moteur, etc.). Il convient de noter que l'impôt sur les terrains et les bâtiments comprend non seulement les impôts récurrents sur les biens immobiliers, mais aussi l'impôt sur les transactions immobilières.

Figure 16 Restructuration de la fiscalité locale 2010-2020 :
a) de la taxe sur les produits vers la taxe foncière
b) de l'impôt foncier à l'impôt sur le revenu

Encadré 17 - Réformes de la fiscalité locale en Serbie

L'impôt foncier local était auparavant évalué, collecté et appliqué par le gouvernement national, mais son rendement a été restitué aux gouvernements locaux sur la base de l'origine. Depuis 2007, les gouvernements autonomes locaux sont chargés d'administrer la taxe et d'en fixer les taux dans certaines limites. En 2012, le cadre fiscal légal a été modifié en limitant la taxe locale sur les enseignes commerciales et en éliminant la taxe locale sur les véhicules à moteur. En 2014, la taxe d'utilisation du sol, deuxième source de recettes propres, a été supprimée afin qu'elle puisse être intégrée à la taxe foncière. En même temps, le gouvernement national a augmenté d'autres taxes centrales, notamment la TVA, l'impôt sur le revenu du capital, les accises et les cotisations sociales.

L'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) est de loin la plus importante source de recettes fiscales locales. En 2019, l'IRPP a représenté 63 % des recettes fiscales des collectivités locales autonomes et 33,5 % des recettes totales. L'IRPP est prélevé par le gouvernement central sur les salaires bruts, en tant que taxe sur les salaires et sur les revenus des indépendants. En juin 2013, le gouvernement a réduit le taux de l'impôt sur les salaires de 12 % à 10 % tout en augmentant le seuil des revenus non imposables. Ces changements ont entraîné une perte directe de recettes locales d'environ 200 millions d'euros. Depuis 2016, les villes reçoivent 77 %, les municipalités 74 % et la ville de Belgrade 66 % des recettes sur les salaires bruts.

Les pays qui dépendent de l'impôt local sur le revenu poursuivent des politiques diverses (Figure 17). Dans les pays où il constitue déjà la principale source de recettes fiscales locales (Autriche, Israël), le poids des impôts sur le revenu (salaires) a encore augmenté. Les pays qui étaient auparavant moins dépendants de l'impôt sur le revenu se sont orientés vers un système de recettes propres locales basé sur le revenu dans les Balkans (Bulgarie, Roumanie, Monténégro), ainsi qu'en Turquie et en Espagne. Au sein de ce groupe de pays, on peut donc détecter une certaine convergence de leurs systèmes fiscaux locaux.

Figure 17 Expérimentation de l'impôt sur le revenu

L'impôt foncier existe dans presque tous les pays membres du CCRE. La majorité des pays ayant une part élevée d'impôts sur les terrains et les bâtiments dans la fiscalité locale ont augmenté leurs recettes d'impôts fonciers (partie gauche de la Figure 18, avec la France comme valeur aberrante). Les pays qui dépendaient moins des taxes foncières locales ne rentraient dans aucun schéma clair à cet égard.

Figure 18 Vers une taxe sur les terrains et les bâtiments

Les réformes fiscales locales ont également visé des objectifs environnementaux, comme les incitations fiscales à la réduction des déchets municipaux introduites en France (Encadré 18).

Encadré 18 - Incitations fiscales pour la réduction des déchets municipaux en France

Les déchets ménagers sont responsables de 4 % des émissions de gaz à effet de serre en France. La Loi de transition énergétique pour la croissance verte (TECV, 2015) a fixé des objectifs de réduction des déchets ménagers de 10 % (par rapport au niveau de 2010, et avant la fin de 2020), d'augmentation du volume de recyclage ou de valorisation organique à 65 % (avant la fin de l’année 2025). Deux catégories d'incitations fiscales ont été introduites :

La Taxe d'Enlèvement des Ordures Ménagères incitative pour les citoyens (TEOMi). La Taxe d'Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM) est un impôt foncier payé par les citoyens (7,1 milliards d'euros en 2020). Les établissements de coopération intercommunale financent la gestion des déchets ménagers principalement par la TEOM. Depuis 2014, les collectivités locales ont la possibilité d'ajouter une incitation liée à la quantité ou au type de déchets collectés. Elles peuvent également choisir d'instaurer une redevance (c'est-à-dire un montant à payer pour le service rendu) à la place de la taxe. Cette redevance pour service rendu est moins répandue (550 millions d'euros).

En 2020, seuls 55 établissements de coopération intercommunale (sur un total de 1 254) ont mis en place une part incitative à la TEOM (33,5 millions d'euros). L'objectif pour 2025 vise à faire participer 25 millions d'habitants à cette tarification incitative ; mais en 2020, seuls 5,9 millions d'habitants étaient concernés par les deux dispositifs.

Les principaux obstacles à la mise en œuvre sont les coûts plus élevés (communication avec les citoyens, achat de nouveaux équipements, formation du personnel), le risque de comportements contre-productifs, tels que les décharges illégales ou l'incinération, et le manque de volonté politique pour procéder à une révision de l'organisation des services.

The main impediments to implementation are higher costs (communication with citizens, purchase of new equipment, training personnel), risk of counterproductive behaviour, such as illegal dumping or incineration, and lack of political will to carry out a service organisation review.

L’augmentation progressive de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). La TGAP est payée par les collectivités locales en fonction du volume de déchets déposés ou incinérés. Afin de réduire le tonnage des déchets sur la période 2021-2025, les taux d'imposition correspondants ont été progressivement augmentés. En même temps, le taux de TVA sur les activités de tri a été abaissé. Le gouvernement central a estimé que l'augmentation des taux coûterait aux gouvernements locaux 104 millions d'euros en 2021 et 210 millions d'euros en 2025. Il n'est pas possible de compenser cette augmentation par une réduction du taux de TVA ou du volume de déchets mis en décharge ou incinérés.

Pour plus d'informations, voir :

1. Terra Nova : la gestion du service des déchets ménagers par les collectivités locales en France - La Banque Postale
2. Tarification incitative parmi les modes de financement du service public déchets | Optigede - Ademe

Autonomie fiscale locale

L'autonomie fiscale infranationale se mesure non seulement par la part des recettes fiscales dans le budget local, mais aussi par le pouvoir du gouvernement local de les prélever et de les collecterL'OCDE a mis au point un indicateur qui classe toutes les recettes fiscales locales selon une typologie à six unités (OCDE, 2020). Chaque impôt est classé selon une échelle allant d'une autonomie élevée, telle que la possibilité de fixer les taux d'imposition, les dégrèvements et les méthodes de partage de l'impôt, à une faible autonomie fiscale, dans laquelle le gouvernement central fixe les taux d'imposition et les dégrèvements. Ces formes d'autonomie fiscale locale ont été subdivisées en quatre catégories afin d'étudier cette question dans les pays du CCRE couverts par les statistiques de recettes de l'OCDE (Figure 19).

La plupart des pays ont une forte autonomie fiscale locale. . Les collectivités locales jouissent d'un pouvoir discrétionnaire dans la fixation des taux d'imposition et des dégrèvements pour la quasi-totalité des recettes fiscales locales. (Les pouvoirs fiscaux des gouvernements régionaux (états) ont été mesurés séparément). Cependant, il existe un autre groupe distinct de pays qui utilisent généralement des systèmes de partage des impôts. La méthode de partage des recettes déterminera le degré de stabilité et de certitude de cette source, en tenant compte du fait que l'accord de partage peut être modifié par le gouvernement central uniquement avec le consentement des gouvernements locaux (autonomie élevée) ou unilatéralement par le biais d'une législation budgétaire (autonomie limitée). Les autres pays se situent quelque part entre les deux, les collectivités locales n'étant responsables que de la perception de l'impôt, tandis que l'assiette, le taux et les allégements fiscaux sont fixés au niveau central (par ex., en Autriche et en Israël).

Figure 19 Autonomie dans la fixation de la majorité des impôts des collectivités locales, 2018

Au cours de la dernière décennie, le niveau d'autonomie fiscale est resté stable. Il n'y a que trois pays dans le rapport de l'OCDE où l'autonomie fiscale a augmenté de manière significative en 2018. La part des impôts dont les taux et les dégrèvements étaient laissés au pouvoir discrétionnaire des autorités locales était plus élevée en Slovaquie, en Grèce et en Italie qu'au début de la période. Les réformes ont été à l'origine de changements majeurs dans ces pays, même si elles partaient d'une base relativement faible au début de la décennie. En France, la taxe municipale d'habitation, importante au niveau local, est progressivement remplacée par des systèmes de partage des revenus (voir Encadré 19).

Encadré 19 - Passage d'un impôt local à un partage des revenus en France

Jusqu'en 2020, une taxe d'habitation communale (TH) était payée par les propriétaires ou utilisateurs de locaux d'habitation. Elle était assise sur la valeur locative cadastrale des logements, évaluée en 1980, réévaluée selon un coefficient annuel proche de l'inflation. Cette taxe rapportait environ 24 milliards d'euros, soit 15,5 % des recettes fiscales locales (en 2020). Elle a été considérée comme une recette inégale, principalement en raison de l'ancienneté de l'assiette.

La suppression progressive de cette taxe d'habitation est prévue pour la période 2018-2023. Depuis 2021, les collectivités locales bénéficient d'une compensation dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale ; en lieu et place de la taxe d'habitation, les communes perçoivent la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties, tandis que les départements et les groupements intercommunaux à fiscalité propre (GFP) perçoivent une part de la TVA nationale.

Certaines conséquences de ce nouveau panier fiscal sont les suivantes :

- Sur les stratégies fiscales : les municipalités ont le pouvoir de fixer les taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Les propriétaires des locaux doivent payer des taxes à la municipalité, ce qui en fait des contribuables ; mais, comme il n'y a pas de condition de résidence, ils ne sont pas nécessairement des résidents locaux et donc pas des électeurs. Ainsi, le lien entre le citoyen et la municipalité est affaibli.

- Sur les inégalités territoriales : la taxe d'habitation reste en vigueur pour les résidences secondaires, dont la répartition est inégale sur le territoire.

- Sur la capacité d'adaptation des départements aux chocs budgétaires : le remplacement de la TFPB par une part de TVA ne constitue pas une évolution défavorable en termes de dynamique des recettes dans le temps. En revanche, la suppression du pouvoir de fixer le taux de la TFPB limite davantage toute adaptation budgétaire à la crise économique.

Pour plus d'informations, voir :

1. Accès Territoires n°7 : la suppression de la taxe d'habitation (modalités et conséquences) - La Banque Postale
2. Réforme de la fiscalité locale - La Banque Postale